Thursday, March 9, 2017

Homélie du dimanche, 5 mars 2017

Premier dimanche de carême

Lectures du jour: Genèse 2:7-9, 3:1-7a; Psaume 50 (51): 3-4, 5-6ab, 12-13, 14, 17; Romains 5:12-19; Matthieu 4:1-11

Qu’est-ce qu’une tentation ? De quoi est Jésus tenté à la fin de ces quarante jours dans le désert dont parle notre Évangile d’aujourd’hui, de St. Matthieu ? Quelles sont parmi nos tentations les plus difficiles à surmonter ?

Il me vient souvent à l’esprit que dans trois des Évangiles, ceux des saints Matthieu, Marc et Luc, le ministère public de Jésus commence par les tentations du diable contre lui dans le désert. La tentation fait partie de notre condition humaine ; dès nos premiers ancêtres, tout être humain a été tenté. On vient d’entendre dans notre première lecture, de la Genèse, l’histoire de notre première tentation et alors de notre premier péché. Notre Seigneur Jésus Christ, qui est Dieu autant qu’homme, n’était pas préservé de la tentation. En fait les Évangélistes représentent Jésus comme plus pleinement humain, plus pleinement comme nous, en plaçant le récit de ses tentations dans le désert avant son ministère. Bien sûr, Jésus n’a jamais succombé à la tentation ; il n’a jamais péché. C’est là la seule différence entre Jésus et Marie (qui fut préservée du péché par la grâce de Dieu et non par ses propres forces) et nous : Nous avons tous péché.

On prie dans le « Notre Père », « ne nous soumets pas à la tentation ». Je trouve que c’est une prière un peu étrange : pourquoi prier notre Père de ne pas nous soumettre à la tentation ? N’est-ce pas que Dieu ne veuille pas que nous soyons tentés, que la tentation soit une réalité dans notre vie sans que Dieu ou nous cherchions à être tentés ? Bon, on ne rentrera pas dans tout un exposé théologique sur le « Notre Père » et la tentation, mais à mon avis il est peut-être utile d’interpréter cette prière, « ne nous soumets pas à la tentation », comme si on priait notre Père de pas nous laisser seul, sans lui, face à la tentation. Nous connaissons nos faiblesses. Nous reconnaissons que nous sommes pêcheurs et que nous ne pouvons pas surmonter nos tentations les plus difficiles sans Dieu.

Alors quelles sont nos tentations les plus difficiles à surmonter ? Suivant les tentations de Jésus, peut-être que parmi nos tentations les plus fortes et difficiles à surmonter, on retrouve celle du pouvoir. Le pouvoir a plusieurs formes : la force physique, l’autonomie de prendre des décisions, le pouvoir politique, le fait d’être parent, ce qui nous donne du pouvoir sur nos enfants, ou le fait d’être ministre ou prêtre dans l’Église, une position de pouvoir certainement… On conçoit même Dieu comme puissant, quelqu’un avec pouvoir. Le pouvoir n’a aucune valeur morale en lui-même. Il est un peu comme nos émotions, en elles-mêmes ni bonnes ni mauvaises, mais qu’on est invité à bien maîtriser, sinon on peut blesser d’autres personnes et/ou nous-mêmes et/ou notre relation avec Dieu.

Les tentations contre Jésus dans notre Évangile d’aujourd’hui sont toutes, d’une manière, centrées sur notre gestion du pouvoir. Imagine qu’on soit dans un désert sous une chaleur étouffante. Ça fait depuis quarante jours qu’on n’a pas mangé, alors on ressent une faim avec une intensité de onze sur dix... Ou bien qu’on soit à la fin d’un Week-end Retrouvaille. Les casse-croûtes étaient à peine suffisantes pour nous soutenir, telle était l’intensité du travail pendant le Week-end. Malgré le meilleur effort de l’équipe Retrouvaille de nous fournir des casse-croûtes, des provisions de pharmacie et d’autres besoins, nous avons faim et nous sommes fatigués.

C’est là où vient sur scène le diable pour nous tenter comme il a tenté Jésus : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains ». Il faut dire que le diable est intelligent. Ça aurait été pour Jésus une très bonne idée, au lieu de jeûner pendant quarante jours, jusqu’à ce qu’il soit au bout de ces forces, de transformer les pierres autour de lui en pains. Le Fils de Dieu aurait certainement eu assez de pouvoir pour le faire. Durant l’exode sous Moïse, ce même Dieu avait fait tomber de la manne dans le désert pour son peuple, mais non, ici Jésus met en priorité la parole de Dieu au delà de ses propres besoins corporels et son pouvoir de se soutenir lui-même : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ».

Cela pourrait-elle être une invitation à nous laisser éclairer et renforcer, surtout dans nos mariages et nos familles, par la parole de Dieu ? Cela pourrait-elle être une invitation, quand on suivra le parcours Retrouvaille au cours de ces prochaines semaines, de commencer toute communication avec une petite prière ou au moins de vous dire par exprès que vous vous aimez et que vous voulez le mieux l’un pour l’autre. Laissez entrer dans vos vies davantage la parole de Dieu, la volonté de Dieu que vos mariages réussissent, la parole de Dieu qui nous appelle à la confiance et à la réconciliation.

Cependant (je suis désolé ici si ce que je dirai vous semblera sombre ; je ne veut pas que ce soit décourageant), la tentation de ne pas se laisser guider par la parole de Dieu, surtout dans nos couples et nos familles, ne sera pas la seule tentation à laquelle on devra faire face. Si jamais on pense d’avoir conquis nos pires difficultés et mêmes démons dans nos mariages, ce qui peut se passer après quelques semaines, mois, ou années quand on a eu des succès avec le parcours que Retrouvaille propose ; si jamais on se croit, figurativement, être au sommet du Temple, c’est là que le diable va nous tenter de nouveau : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et ils te porteront sur leurs mains ».

Voilà une tentation sournoise : « Si tu es Fils de Dieu »… On est loin d’être le Fils de Dieu d’une part (de l’autre part, on est tous fils et filles de Dieu) alors, je répète, on ne peut pas surmonter la tentation sans Dieu. Même Jésus, le Fils de Dieu qui aurait pu vaincre le diable et ses tentations tout seul s’il l’avait voulu, « fut conduit au désert par l’Esprit » et, après avoir été tenté, fut accompagné et servi par des anges. Alors Jésus, notre Seigneur et vainqueur du diable, de la tentation, et du péché, nous invite d’avoir confiance en son pouvoir et non seulement en le nôtre. Si on a confiance en Jésus lors des plus petites tentations, on vaincra plus probablement les plus grandes. Bien que Dieu est toujours à notre disposition, et qu’il n’ait pas de péché trop grand à pardonner, une famille ou un couple confiant en l’accompagnement de notre Dieu, et non seulement lors des grandes crises mais longtemps avant ; un couple ou une famille qui consacre même un peu de temps (quelques minutes par jour) à la prière ensemble pourra mieux répondre au diable et à ses tentations comme Jésus lui a répondu : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu ».

Si on arrive à surmonter ces premiers types de tentations de l’égoïsme, à une mentalité du « je peux m’en sortir sans Dieu », on aura souvent à faire face à un troisième type de tentation, symbolisé par la troisième tentation de Jésus dans notre Évangile, au sommet d’une montagne, d’être propriétaire de tous les royaumes du monde : « Tout cela, je te le donnerai, si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi ». Cette troisième tentation est vers une certaine forme d’idolâtrie, que ce soit le culte de l’état, de l’argent, ou d’autres sources de pouvoir de ce monde. Encore, je dis, le pouvoir n’est pas mauvais en lui-même, si on le subordonne à Dieu. Mais finalement, à mon avis, Jésus nous rappelle de faire attention de ne pas trop valoriser des richesses ou aduler des personnages publics qui n’ont peut-être pas au cœur nos biens les plus importants, et qui ne comprennent souvent pas surtout le mariage comme Dieu nous invite à le comprendre : l’union permanente d’un homme et d’une femme qui se reflètent l’amour de Dieu, qui se donnent la vie et qui donnent la vie au monde.

Demandons alors l’aide de notre Seigneur Jésus pour que nous puissions dire avec lui ensemble, au sein de nos couples mariés, de nos familles : « Arrière, Satan ! Car il est écrit : C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte ». C’est le Seigneur, lui seul, qui nous accompagne lors de la tentation, qui nous laissera jamais seul face à nos tentations et nos crises, qui fortifie nos mariages, signe sacramentelle de l’amour sans condition de Dieu pour nous. C’est enfin notre Dieu seul, à travers nous, l’Église, qui nous pardonne nos péchés et qui nous conduit à la vie éternelle.

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